Votre temps est inestimable, utilisez-le judicieusement…
3 février 2025 - (temps de lecture : 5 minutes)
Nous courons tous.
Vers notre travail, vers nos obligations, vers nos rêves, vers un idéal souvent inatteignable. Nous courons sans répit, persuadés que l'urgence et la rapidité sont synonymes d'efficacité et de succès. Mais vers où courons-nous, au juste ?
On court, persuadés que plus on va vite, plus on est quelqu'un. Mais quelqu'un de quoi, au juste ?
Il y a plus de 30 ans, Raymond Devos (un génie des mots comme on en fait plus) nous alertait avec humour avec son sketch "Où court-il ?"
On court... mais pourquoi, au fait ? Pour ne pas être en retard à notre propre enterrement ? Pour arriver premier sur une ligne d’arrivée qui est, spoiler alert, la même pour tout le monde ?
Nous courons pour fuir l'ennui, pour être à l'heure, pour ne pas manquer une opportunité, pour être productifs, pour exister, pour donner un sens à nos vies. Et pourtant, à force de courir, nous oublions parfois de vivre.
La vie n’est pas un sprint, c'est un marathon, où chaque instant compte. Les stoïciens nous rappellent sans cesse : "Memento mori." "Souviens-toi que tu vas mourir".
Si la ligne d’arrivée est la même pour tout le monde, pourquoi y courir tête baissée, au risque de ne rien voir du paysage ? Pourquoi ne pas ralentir, marcher, contempler, s’arrêter, flâner, s’ennuyer même ? Car l’ennui est aussi une part du voyage, un espace de réflexion et de créativité.
Nous sommes pris dans une illusion du temps : persuadés qu’il nous en manque sans cesse. Nous cherchons à tout compresser, à optimiser chaque instant, à remplir le vide, comme si le vide était une faute, un gaspillage. Or, c’est peut-être là que se cache la véritable richesse : dans ces instants d’inactivité apparente où l’esprit vagabonde, où l’âme respire.
Arrêtons-nous un instant. Regardons autour de nous. Les visages aimés, la beauté d’un ciel, la musique d’un ruisseau, le silence d’une forêt. Partageons le chemin plutôt que de nous bousculer pour arriver plus vite. Car au bout du compte, le seul horizon qui nous attend tous est le même. Et ce n’est pas la vitesse qui compte, mais la richesse du voyage et les personnes avec lesquelles nous l'aurons partager...
Vous ne connaissez pas le sketch de Raymond Devos ?
Le voici en vidéo, un incontournable de la langue française !
Pour ceux qui préfèrent lire, voici le texte de Raymond Devos :
Excusez-moi, je suis un peu essoufflé ! Je viens de traverser une ville où tout le monde courait...Je ne peux pas vous dire laquelle... je l'ai traversée en courant. Lorsque j'y suis entré, je marchais normalement, mais quand j'ai vu que tout le monde courait... je me suis mis à courir comme tout le monde sans raison ! A un moment je courais au coude à coude avec un monsieur...
- Dites-moi... Pourquoi tous ces gens-là courent-ils comme des fous ?
- Parce qu'ils le sont !; Vous êtes dans une ville de fous ici... Vous n'êtes pas au courant ?
- Si, si, des bruits ont couru !
- Ils courent toujours !
- Qu'est-ce qui fait courir tous ces fous ?
- Tout ! Tout ! Il y en a qui courent au plus pressé. D'autres qui courent après les honneurs... Celui-ci court pour la gloire... Celui-là court à sa perte !
- Mais pourquoi courent-ils si vite ?
- Pour gagner du temps ! Comme le temps, c'est de l'argent, plus ils courent vite, plus ils en gagnent!
- Mais où courent-ils ?
- À la banque ! Le temps de déposer l'argent qu'ils ont gagné sur un compte courant. et ils repartent toujours courant, en gagner d'autre !"
- Et le reste du temps ?
- Ils courent faire leurs courses au marché !
- Pourquoi font-ils leurs courses en courant ?
- Je vous l'ai dit, parce qu'ils sont fous !
- Ils pourraient tout aussi bien faire leur marché en marchant, tout en restant fous !
- On voit bien que vous ne les connaissez pas ! D'abord le fou n'aime pas la marche...
- Pourquoi ?
- Parce qu'il la rate !
- Pourtant, j'en vois un qui marche !?
- Oui, c'est un contestataire ! Il en avait assez de courir comme un fou, alors il a organisé une marche de protestation !
- Il n'a pas l'air d'être suivi ?
- Si, mais comme tous ceux qui le suivent courent, il est dépassé !
- Et vous, peut-on savoir ce que vous faîtes dans cette ville ?
- Oui ! Moi j'expédie les affaires courantes. Parce que même ici, les affaires ne marchent pas !
- Et où courez-vous là ?
- Je cours à la banque !
- Ah !... Pour y déposer votre argent ?
- Non ! Pour le retirer ! Moi je ne suis pas fou !
- Mais si vous n'êtes pas fou, pourquoi restez-vous dans une ville où tout le monde l'est ?
- Parce que j'y gagne un argent fou ! C'est moi le banquier !